May 14, 2013
Vers une démocratie transnationale pour lEurope : lancement du Pacte citoyen
Par Lorenzo Marsili et Niccolò Milanese
Traduction : Anaëlle Hubert
Alors que le Conseil Européen se réunit à Bruxelles afin de décider des futurs traités pour uncontrôle financier plus important encore, à 200 mètres du Conseil, au Parlement Européen, Alternatives Européennes et ses partenaires lancent un processus participatif du bas vers le haut d’un an appelant une Europe radicalement démocratique et répondant au Pacte Fiscal par le développement d’un Pacte Citoyen, mené par les citoyens eux-mêmes. La brochure « Vers une démocratie transnationale pour l’Europe » tente de poser les bases de ce Pacte Citoyen transnational.
Pour le programme et plus d’informations, cliquez ici. Ceci est un extrait qui résume les idées principales. Pour lire le texte entier, vous pouvez télécharger la brochure ici (en anglais).
La crise économique et financière, qui fait l’objet de tant de discussions depuis 2007-2008, n’est qu’un seul aspect de toute une série de tendances politiques sous-jacentes qui sont apparentes depuis bien plus longtemps : une crise d’(in)égalité et de précarité grandissante de la main d’œuvre, une crise des droits de l’Homme, une crise démographique, une crise écologique, une crise des libertés civiles, et surtout, une crise de la démocratie.
L’insistance des dirigeants politiques à conserver un état de « crise » – un état d’exception – pourl’économie, fait aussi partie d’une stratégie pour maintenir le semblant d’une séparation entreles problèmes économiques et des problèmes sociaux plus larges, ce qui donne à la crise une apparence technique et délégitime l’expression de passions politiques et d’alternatives générales, tout en « légitimant » toute une série de réformes politiques et sociales discrètes sous la bannière de « l’austérité ».
La politique d’austérité est une conséquence de l’échec démocratique en Europe et de la centralisation des pouvoirs décisionnels dans des institutions n’ayant aucun compte à rendre, à commencer par le Conseil Européen. Un semblant de souveraineté nationale est conservé dans la méthode « intergouvernementale » du Conseil, qui en réalité permet aux acteurs les plus puissants dictent l’agenda, et qu’elle garantit que l’intérêt commun des Européens – et les institutions chargées de maintenir l’intérêt commun européen – sontcontinuellement ébranlés par des négociations compétitives.
Nous n’avons pas le luxe de décidersinous voulons ou non d’une réforme de l’architecture institutionnelle européenne : au niveau européen,il existedéjà une procédure quasi-constitutionnelle dans laquelle les citoyens ont à peine leur mot à dire, car ils sont, en réalité, divisés en circonscriptions nationales, et dressés les uns contre les autres.
Pendant que le Président du Conseil Européen, la BCE, l’Eurogroupe et la Commission travaillent sur des propositions pour le changement du traité, qui sera surtout de nature fiscale vers plus de « discipline »,les citoyens n’ont peu ou pas d’opportunités pour exercer leur citoyenneté et articuler leurs priorités ou leurs alternatives au niveau européen. Comme si le Pacte budgétaire ne suffisait pas, enfermant beaucoup d’Européens dans la pauvreté, de nouveaux traités sont en vue, se concentrant encore plus surdes bases fiscales.
Deux perspectives sont présentées aux citoyens pour faire face à ce processus. D’un côté, l’option leur est donnée de soutenir une plus grande intégration de l’UE sur la base de la concurrence, de la déréglementation et de la libéralisation sans accroissement de la démocratie. De l’autre, il y a la proposition de la désintégration de l’Union Européenne et une consolidation de l’État-nation.
La démocratie par le bas
Les mouvements sociaux qui réagissent face à la crise économique doivent ouvrir une troisième voie etmettre au pointune proposition pour une démocratie radicale en Europe, en exigeant le développement de modèles clairs d’une démocratie à la fois représentative et participative, pour renforcerla prise de décisionpolitique des citoyens, pour leur donner le pouvoir de participer aux processus politiques, et pour restaurer le contrôle démocratique et surveiller les marchés financiers et le capital. Ces objectifs ne peuvent être atteints qu’en prenant l’échelle continentale comme horizon d’action.
Une telle proposition pour une infrastructure démocratique institutionnelle ne peut pas être développée par un petit nombre d’experts ou de technocrates ; ce doit être un processus constitutionnel large et collaboratif, qui implique autant de citoyens que possible. Un tel procédé permettra aux Européens de faire valoir pleinement leur citoyenneté et de faire partie d’un projet historique inspirant : créer une démocratie à l’échelle continentale.
Pour démarrer ce processus, nous proposons qu’il y ait :
Première partie : Pacte Citoyen – un processus qui vient d’en bas
Nous pensons que les discussions devraient être centrées sur ces trois questions :
- Comment garantir une prise de décision démocratique, à l’échelle européenne, dans laquelle les intérêts des gens sur tout le continent ainsi que les conséquences des décisions européennes pour les autres personnes affectées seraient pris en compte et l’intérêt commun assuré, grâce à un procédé juste et transparent ?
- Comment garantir le maximum de possibilités pour la participation directe des citoyens dans la prise de décision politique, comme expression de la citoyenneté européenne et comme meilleure assurance de l’intérêt commun ?
- Quels problèmes économiques, politiques et sociaux devraient mieux être abordés au niveau européen, et quelles compétences législatives les institutions transnationales démocratiques devraient-elles avoir dans ces domaines ?
Deuxième partie : Faire campagne pour une réforme démocratique
Beaucoup des changements proposés par un tel processus participatif pourraient exiger un changement du traité de l’Union Européenne, et par conséquent l’unanimité des États-membres. Nous pensons que les conditions du traité ne devraient pas empêcher les citoyens européens de mettre en place des procédés de changement et d’ensuite adopter diverses stratégies pour promulguer ces changements : la première étape importante serait d’établir des mouvements transnationaux de citoyens, pour une infrastructure démocratique en Europe ; puis, la deuxièmeétape seraitde mettre en placedes stratégies qui dépendent des procédures judiciaires, afin de forcer l’adoption du changement institutionnel. Laisser toutes les initiatives pour le changement du traité aux États Membres ou, pire, seulement à certains États Membres puissants, n’est plus une option acceptable, et renforce l’impression que les seules optionssont de se soumettre à l’autorité des chefs des États Membres les plus puissants, ou d’abandonner toute intégration européenne : nous pensons qu’une troisième alternative, où les citoyens eux-mêmes proposent une véritable démocratie européenne, est possible.
Un programme positif pour le triomphe de la politique en Europe dépend de notre capacité collective à redessiner les institutions de la démocratie qui peuvent vraiment agir sur nos inquiétudes, projets et problèmes communs. Ces institutions doivent être bâties au niveau européen, où d’autres forces exploitent actuellement un vide laissé par les citoyens. L’opportunité doit être saisie maintenant.