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FAQ sur le revenu de base

by Alessandro Valeravalle 7Par Alessandro Valera
Traduction: Alexis Gratpenche

1. Quand est apparue l’idée d’un revenu de base ?

Le monde du travail a connu des changements profonds depuis les années 90. En Europe, les relations de travail ont vu disparaître le modèle fordien, dans lequel les travailleurs, après un passage par le système éducatif conventionnel et gratuit, trouvaient un travail à vie.
Un travail que la plupart des travailleurs conservait jusqu’à leur retraite et qui leur garantissait une certaine protection quand ils tombaient malade, attendaient un enfant ou étaient victimes d’un accident.
Les retraites étaient alors financées par les cotisations salariales et patronales prélevées au cours de la trentaine d’années pendant lesquelles l’employé restait dans la même entreprise ou au moins dans le même secteur professionnel.
Ce modèle a fonctionné pendant les quelques décennies où l’économie était florissante, où la pyramide démographique faisait en sorte qu’à un petit nombre de retraités correspondait un grand nombre de travailleurs, et où l’Europe occidentale connaissait peu de concurrents économiques dans les pays pauvres du “tiers-monde” et aucun dans les pays socialistes du “second monde”.

Avec la fin du communisme, la globalisation et les changements démographiques, ce modèle a cessé d’être viable et la majorité des pays se sont mis à déréguler le monde de travail, en y introduisant une dose de flexibilité, notamment dans les relations entre employeurs et employés. Le travail est devenu un bien de consommation, au service du profit, dont l’on peut se débarrasser quand on en n’a plus le besoin.
Les jeunes en premier, puis peu à peu les autres sphères de la population, n’avaient d’autre choix que d’accepter des emplois soumis à aucune règle, ni protégés d’aucune manière, ce qui a contribué à l’apparition de conditions de travail précaires, puis à des conditions de vie précaires (autrement dit, la précarité).

L’idée d’un revenu de base a vu le jour dans ce contexte historique : si le travail n’est plus synonyme de protection sociale pour les travailleurs et leur famille, il est nécessaire d’opérer un changement qui fasse de la protection sociale minimum un droit universel auxquels ont droit tous les citoyens (ou résidents) d’un pays, quelque soit leur situation professionnelle.

2. Est-ce que l’instauration d’un revenu de base ne découragerait pas les demandeurs d’emploi à chercher du travail s’ils reçoivent de l’argent pendant leur période d’inactivité ?

Le revenu de base est souvent fixé par rapport au seuil de pauvreté, qui marque la limite au-dessous de laquelle un individu ne peut pas vivre dignement. Toute personne qui n’atteint pas ce seuil, par l’emploi ou par d’autres sources de revenu, touche la différence grâce à des indemnités mensuelles.
Bien que le seuil de revenu de base puisse atteindre 1200 €uros dans des pays comme le Danemark ou le Luxembourg, il est généralement fixé à un niveau assez élevé pour couvrir les besoins fondamentaux des personnes tout en restant suffisamment bas afin d’encourager la plupart d’entre elles à chercher activement un emploi afin d’améliorer leurs conditions de vie.

En outre, un revenu de base permettrait au travailleurs, et avant tout aux travailleurs précaires qui ne bénéficient pas des accords collectifs et du soutien des syndicats, de pouvoir choisir un poste convenable sans avoir à subir le chantage de leur employeur.
En retour, une telle politique aurait des répercussions positives sur la situation économique en général. Un revenu de base réduirait le nombre de personnes qui acceptent des emplois aliénants, éreintants et mal payés et pousserait inévitablement les employeurs à choisir entre les deux options suivantes : augmenter la rémunération de ces emplois ou investir dans des technologies et des modèles d’organisation plus efficaces et plus modernes.

Un revenu de base favoriserait également l’entrepreneuriat. Davantage de personnes envisageraient de créer leur entreprise s’ils étaient assurés de recevoir une forme de revenu pendant les tout premiers mois, alors que l’entreprise décolle et ne dégage peut-être pas encore un revenu suffisant pour l’entrepreneur.

3. Comment les pays européens, frappés par une crise de la dette souveraine, peuvent-il se permettre de verser des indemnités à tous ceux qui remplissent les conditions d’accès à un revenu de base?

Un fonds pour le revenu de base engloberait plusieurs formes de prestations déjà existantes (indemnités d’incapacité, indemnités chômage, etc.), ce qui entrainerait une diminution des coûts excessifs qu’engendre la bureaucratie chargée de l’attribution et de la supervision des différentes prestations.

Néanmoins, cette politique aurait un coût pour les Etats, qui alors devraient augmenter leurs recettes fiscales ou réduire le fonctionnement d’autres services pour financer ce fonds.
Or, comme il l’a été dit plus haut, les changements dans le monde du travail vont de pair avec des changements sur le marché économique et financier. A l’heure actuelle, les Etats taxent surtout leurs citoyens sur le travail (impôt sur le revenu) et la consommation (TVA). Au regard des coefficients de Gini qui mettent au jour la polarisation qui existe dans l’Europe toute entière entre une classe moyenne de plus en plus restreinte et une petit nombre de super-riches qui gagnent toujours plus, l’imposition pourrait se faire sur les capitaux personnels plutôt que sur le travail, touchant ainsi les propriétaires d’actifs importants, de biens fonciers et de produits de luxe. Ou bien, encore plus simplement, une taxe sur les transactions financières comme celle qui est proposée depuis des décennies, même à 0,01%, serait suffisante pour financer le revenu minimum. La réduction des privilèges de l’élite politique et de certaines organisations religieuses pourrait aussi contribuer à remplir un tel fonds, tout comme la mise en place d’une législation forte en matière d’évasion fiscale.

Le message est très simple : ce ne sont pas les sources de financement qui manquent mais le bon-vouloir politique. En mettant en oeuvre ce genre de mesures (et d’autres encore), les Etats seraient assurés du financement de ces fonds.

4. Quelle devrait être la somme à allouer mensuellement aux allocataires ?

En octobre 2010, le Parlement européen a voté une résolution dénommée “Rôle du revenu minimum dans la lutte contre la pauvreté et la promotion d’une société inclusive en Europe”, qui appelle les Etats membres à fixer le seuil du revenu minimum à 60 % ou plus du revenu médian du pays concerné. Nous estimons que la requête du Parlement européen est raisonnable.

5. Quel est le lien entre revenu de base et genre?

Le modèle de l’Etat-providence qui était dominant en Europe de la fin de la seconde Guerre mondiale jusqu’à l’introduction du revenu de base prenait pour unité de base la famille, plutôt que l’individu. La plupart du temps, les femmes ne travaillaient pas de manière officielle, se voyaient assigner les seules tâches ménagères et maternelles, et dépendaient des revenus de leur mari. Le système de l’Etat-providence fonctionnait de telle sorte que les indemnités allouées aux travailleurs couvraient les besoins de leur partenaire et de leurs enfants.

Les femmes se retrouvaient donc soumises à la situation professionnelle de leur mari, qui avaient la possibilité d’être hors du foyer familial 8 heures par jour grâce au travail domestique non-rémunéré de leur femme. Un système de revenu de base basé sur l’individu (âgé de plus de 18 ans en général), et non sur la famille, donne aux hommes et aux femmes une place égale dans la société. Le travail non-rémunéré tel les soins maternels est ainsi reconnu par l’Etat comme une activité qui mérite d’être au moins indemnisée au niveau du revenu de base. Même les femmes sans enfants ou célibataires pourraient alors gagner leur autonomie et leur indépendance financière.

Il faut signaler que les critiques des féministes sur le revenu de base sont nombreuses et que toutes les études ne voient pas le revenu de base comme une solution miracle pour rendre les femmes plus fortes. Toutefois, la plupart d’entre elles s’accordent à dire que l’adoption d’un système d’Etat-providence basé sur le citoyen augmenterait l’égalité entre les hommes et les femmes.

6. Qui toucherait ce revenu de base ? Les plus riches le toucheraient-ils également ?

Ce critère varie d’un modèle à l’autre mais la principale différence avec les autres formes de protection sociale est l’unité de base, qui est l’individu et non la famille. Tout citoyen âgé de plus de 18 ans (dans certains cas 16 ans, dans d’autres cas encore 21 ans) qui ne bénéficie pas d’un revenu mensuel supérieur au seuil défini recevrait une indemnité de l’Etat, ou d’une de ces régions, qui comblerait la différence.

Certains défendent l’idée qu’un revenu universel doit être versé à tous, quelque ce soit leur richesse. Ainsi, si le seuil est fixé à 700 €, tous devraient toucher cette somme, qu’ils ne gagnent pas un centime ou qu’ils gagnent des millions.
Cependant, la majorité des modèles (dont ceux défendus par Alternatives Européennes) n’accorderaient pas cette distribution et couvriraient seulement les individus qui n’ont pas de revenus suffisants pour vivre dignement.

7. Le revenu de base ne serait-il pas discriminatoire envers les migrants et les autres non-ressortissants?

Non. Le terme de “revenu de citoyenneté” a en effet été remplacé dans la plupart des cas par “revenu de base” afin d’éviter ce malentendu. Tout citoyen, ainsi que toute personne résidant sur le territoire d’un pays donné, aurait droit à cette indemnité. Cela ne concernerait évidemment pas les sans-papiers qui, par définition, ne sont pas inscrits sur les registres nationaux. On peut donc y voir une forme de discrimination mais nous estimons que ce n’est pas le revenu de base qui est
discriminatoire mais plutôt les politiques en matière d’immigration et de droits de résidence.

8. Le revenu de base n’est-il pas une idée de droite visant à diminuer l’Etat-providence?

L’Etat-providence tel qu’il a été institué en Europe n’est désormais plus adapté aux besoins des citoyens du continent. Le revenu de base ne signifie pas la fin des indemnités sociales existantes pour ceux qui y ont droit. Pour celles et ceux qui disposent d’un contrat qui couvre les congés de maternité, les congés de longue maladie ou les licenciements ; leur taux d’indemnisation resterait identique, s’il est supérieur au seuil fixé. Cependant, à des millions de citoyens qui ne bénéficient
pas de tels contrats (en particulier les jeunes et les femmes), le revenu de base offrirait une protection sociale qui ne dépend pas du travail et qui concerne donc davantage de personnes.

9. Quelles conséquences aurait la création d’un revenu de base sur les relations entre employeur et employé ?

L’employé ne serait plus soumis au chantage de son employeur. Dans les pays où le salaire minimum n’existe pas (ou est fixé à un très bas niveau), les travailleurs n’ont souvent pas d’autres choix que d’accepter des emplois extrêmement mal rémunérés. La mise en place d’un revenu de base réduirait le nombre de personnes prêtes à accepter des emplois mal-rémunérés, ou des emplois aliénants à moins de recevoir un salaire plus important.

Aujourd’hui, on fait chanter ces travailleurs pour les pousser à accepter de bas salaires et des conditions de travail déplorables avec le risque de ne pas voir renouveler leur contrat de travail temporaire. Le revenu de base (associé à un salaire minimum, à de meilleures conditions de travail et à de meilleurs contrats) renforcerait le statut des travailleurs en les rendant moins vulnérables face au chantage. Ils seraient en mesure de demander personnellement de meilleures conditions de travail et de meilleurs contrats.

Les indemnités versées par les employeurs, quant à elles, continueraient d’exister et les employeurs continueraient à cotiser pour les fonds de retraite et à financer les congés de maladie ou de maternité si tel est stipulé dans les contrats. Le revenu de base serait toutefois la seule source de revenu des travailleurs précaires ou atypiques, quelque soit le statut de leur employeur.

10. Exigerait-on des bénéficiaires du revenu de base qu’ils acceptent des offres d’emploi et se verraient-ils retirer cette aide en cas de refus ?

Cette question est celle qui divise le plus les partisans du revenu de base. Ceux qui soutiennent l’idée d’une attribution inconditionnelle estiment que l’Etat devrait verser ce revenu jusqu’à ce que le bénéficiaire trouve une source de revenu qui lui convienne (grâce à travail gratifiant).
D’autres trouvent raisonnable que, si les bénéficiaires sont ni étudiants, ni engagés dans une activité bénévole, ni chargés de s’occuper de leur famille, l’Etat exige d’eux qu’ils consultent un agent du service pour l’emploi et acceptent l’emploi qui leur est proposé, à condition qu’il corresponde à leur expérience professionnelle et à leur niveau d’études, qu’il donne droit à un salaire équivalent ou supérieur à l’ancien emploi du bénéficiaire et qu’il soit localisé à une distance raisonnable de leur
lieu de résidence. S’ils rejetaient une telle offre, ils se verraient retirés le droit au revenu de base.

Beaucoup de partisans du revenu de base demande que cette prestation ne soit pas liée à la question du travail ou à tout autre revenu : c’est à dire qu’elle soit inconditionnelle. Cela signifie qu’accepter une offre d’emploi n’est pas une condition (mais que l’indemnité est fixée à un niveau assez bas pour encourager les bénéficiaire de chercher un travail. De plus, beaucoup estiment que ce revenu devrait être versé à tous, quelque soit leur situation financière – avant d’être à nouveau perçu par l’Etat grâce à une imposition plus forte de ceux qui ont assez de ressources. L’idée derrière cet argument est que la défense d’un droit universel profite à tous et qu’il est ainsi un facteur de cohésion sociale.

Sources

Regione Lazio (2009) Reddito Garantito e Nuovi Diritti Sociali. Rome : Beniamini Group

Rey Pérez, J.L. (2004) A New Gender Perspective for Basic Income. Présenté au Congrès BIEN :
“The Right to a Basic Income. Egalitarian Democracy”. Barcelone, 18-21 septembre 2004

San Precario (2012) Faq sul reddito di base: risponde San Precario. Version en ligne disponible à
www.ilfattoquotidiano.it/2012/01/09/reddito-base-risponde-precario/182512/