Une rupture démocratique pour l’Europe – Appel à une assemblée démocratique à Florence

Traduction par Aliénor Daumalin

Cet appel marque le début du processus participatif visant à l’organisation d’une grande assemblée européenne à Florence – Informations sur l’assemblée de Florence et les moyens d’y participer ici

Ces deux dernières années, la réponse des élites européennes face à la crise économique et financière s’est caractérisée par une violente centralisation des pouvoirs décisionnels supranationaux. Les nouvelles instances dirigeantes pressenties ne souffrent plus seulement d’un «déficit démocratique»: elles représentent aujourd’hui une véritable « fuite face à la démocratie ».

Qui prend les décisions dans l’UE ? Pour répondre à cette question, il suffit d’examiner les conclusions du dernier Conseil européen. Nous y découvrons notamment que le choix des prochaines mesures du programme de l’Union économique et monétaire sera laissé à un groupe composé des Présidents du Conseil européen, de la Commission, de l’Eurogroupe et de la Banque centrale européenne. Les États membres et le Parlement européen ne pourront, pour leur part, que donner leur avis. Il paraît évident que la conduite de l’Union Européenne dépend de plus en plus d’une oligarchie qui répond aux exigences des marchés financiers. 

Mais l’avenir des Européens ne doit pas dépendre des choix d’une oligarchie; il devrait être déterminé par les citoyens européens eux-mêmes. Le silence du Parlement européen est choquant, alors qu’il accepte une nouvelle fois d’être relégué à un simple rôle consultatif. Cette situation nous pousse à lancer une vraie alerte démocratique. Le Conseil européen a confirmé et consolidé la construction d’un édifice sans précédent dans l’histoire des démocraties, détruisant les fondations de l’État bourgeois, basé sur le principe « pas de taxe sans représentation ». Nous sommes témoins de la formation d’un système monétaire, fiscal et bancaire en faveur d’une économie de marché qui se doit d’être compétitive dans un ce monde dominé par le paradigme néo-libéral. Un système qui sera formé et gouverné par une structure technocratique, sans mandat démocratique, qui ne sera jamais contrôlée et n’aura de compte à rendre à personne, pas même aux institutions représentatives.

L’approbation du pacte budgétaire n’est que la dernière étape en date vers l’imposition d’une discipline fiscale encore plus stricte, et qui fait suite au  Semestre Européen, au pacte pour l’Euro-plus ainsi qu'au Six pack (paquet législatif sur la gouvernance économique), C’est l’idéologie même du modèle social européen qui est jugée obsolète, comme l’affirme régulièrement Mario Draghi. La déstructuration des bases des conditions matérielles et du droit du travail, la désintégration de la protection sociale ainsi que la privatisation incessante des services essentiels et des biens publics impliquent, semble-t-il, un effondrement grandissant de la démocratie, y compris sous ses formes représentatives. Les élections elles-mêmes se déroulent dans un climat anormal, détérioré par la menace permanente de la crise de la dette souveraine et par les fluctuations dangereuses des marchés financiers.

Toute opposition à l’iniquité et l’inefficacité des décisions économiques et sociales imposées sous la menace de la dette doit être accompagnée par une mobilisation énergique, capable de résister à l’affaiblissement de la vie démocratique des citoyens et de ranimer la démocratie en Europe. Nous avons besoin d’une rupture démocratique, rupture fondée sur le rejet de la construction d’une technocratie et de ses directives, et sur la revendication d’instaurer un processus constitutionnel démocratique pour bâtir une autre Europe.

Nous invitons à former une grande coalition de mouvements sociaux, d’associations, de syndicats et d’unions politiques, mais aussi de citoyens qui se sentent concernés par ce besoin manifeste de démocratie en Europe. Nous proposons à cette coalition de se réunir à l’assemblée qui se tiendra lors des mobilisations « Florence 10+10 », du 4 au 8 novembre. Ce sera l’occasion pour les nombreuses voix qui se sont fait entendre à travers l’Europe ces derniers temps de se réunir autour d’un ensemble de revendications pour une réforme démocratique.

Ce front démocratique devra être véritablement transnational, gardant donc à l’esprit l’importance de l’espace de l’Europe centrale et de l’Est, et devra contribuer à développer de nouvelles pratiques politiques des mouvements, partis et syndicats européens. Car la démocratie ne dépend pas seulement des institutions mais aussi de la capacité des citoyens à participer activement au développement de nouvelles pratiques politiques transnationales.