Prendre les choses en main : un pari pour la jeunesse

Traduit par Jessica Tsala

Dans le cadre de la journée internationale de la femme #womensday, nous voulons mettre en lumière, l’impact qu’ont les jeunes femmes qui aident leur génération à s’en sortir dans la vie. C’est pourquoi nous sommes très heureux de partager avec vous notre interview de Sarah Drummond @rufflemuffin co-fondatrice de @wearesnook et directrice  de @thisisthematter.

Vous nous avez parlé des différentes techniques de recherche – de beaucoup de celles que vous utilisez dans le cadre de @wearesnook et je constate à quel point elles permettent aux jeunes de trouver leur voie. Ce qui me semble particulièrement intéressant, c’est que ce sont les jeunes eux-mêmes qui utilisent ces techniques pour recueillir les histoires de personnes dans leur situation et découvrir les techniques de conception d’un journal. Comment s’est passée la mise en application de ce type de techniques ? Comment ces jeunes ont-ils gagné l’assurance nécessaire pour prendre en main la production d’un journal ? Quel a été le cheminement ?

C’est compliqué ! Le premier groupe a posé un peu plus de difficultés. En Écosse, cinq étapes définissent le processus de réinsertion sur le marché du travail. Nous travaillions avec un groupe qui se trouvait à 3,5 étapes du but. Ils étaient plutôt motivés. Certains d’entre eux étaient déjà engagés auprès d’initiatives en faveur de la jeunesse. On a ainsi vu deux personnes prendre les commandes concernant l’orientation que devait suivre le groupe.

Ce n’était pas vraiment le cas du second groupe. Ils étaient sans diplômes et ils avaient quitté l’école sans trop de perspectives d’avenir. Ils ne se sentaient pas vraiment impliqués dans la création du journal. En d’autres termes, il s’agit simplement de discuter avec d’autres personnes de leur génération. Ils avaient leurs propres groupes de discussion dans des écoles. Ils ont rencontrés des professionnels.

Ce que je remarque à chaque fois avec @thisisthematter, c’est que même lorsque nous expliquons en détail ce qui se passe au cours du programme, nous avons encore peu de recul. Le premier groupe adorerait recommencer l’expérience, parce qu’il s’en est très bien sorti. Une des participantes s’est écriée : « je n’en reviens pas, nous avons créé un journal ! »

En ce qui concerne les techniques de recherche, nous nous apercevons qu’il est possible de former des groupes mixtes en termes de compétences. Dans un groupe tel que celui que nous avons constitué, cela peut s’avérer très utile. En développant une application Matter journalism, nous voulons réussir à mobiliser les gens en ligne. De cette façon, si vous avez une question, nous pouvons la soumettre à un groupe de jeunes individus, qui se charge d’obtenir une réponse en consultant d’autres personnes, en fonction de leur domaine de spécialité.

Ce n’est pas simple, il y a beaucoup de travail à fournir. Nous avons réalisé qu’il ne s’agit pas que d’un boulot de designer. Nous faisons face à beaucoup de questions d’ordre comportemental, c’est pourquoi nous devrions travailler avec des éducateurs sociaux et les municipalités locales. Même après deux numéros pilotes, nous ne nous sommes toujours pas décidés.

J’ai trouvé intéressant, le fait que vous ayez comparé les deux pilotes en fonction du profil des participants. J’imagine qu’il faut un certain degré d’assurance et d’empathie pour y parvenir. Nos recherches, nous ont permis de constater l’importance du réseau lorsqu’il s’agit d’aider des personnes à s’en sortir. Il est intéressant de remarquer, que vous êtes ici en présence d’un groupe où des leaders ont émergé et pour lesquels il est naturellement plus facile d’écrire des articles et de concevoir un journal. Avaient-ils naturellement des dispositions à exercer un rôle de leader dans leur réseau social ou les ont-ils développées à l’issue du pilote ? Est-ce quelque chose qui s’est réveillé pendant le pilote ?

Au cours du premier pilote, l’une des participantes s’est naturellement imposée comme leader. Deux filles sont parvenues à gagner assez d’assurance pour lui tenir tête. Elle a pas mal résisté. Lors de la première session, nous étions un peu inquiets car nous ne savions pas si quelqu’un allez s’en mêler. Une des filles s’est vraiment imposée, alors que la première fois que nous l’avions rencontrée, elle s’était contentée de fixer le sol.

En ce qui concerne le second groupe, je crois que nous avons sélectionné trop de filles. Certains participants se sentent vraiment impliqués. Nous avons pu observer qu’ils essayent de développer une dynamique de groupe.

Si vous laissez une chance aux gens, ils pourront s’imposer et prendre les choses en main. Pour l’événement de lancement, Joanna, Darra et moi-même avons conçus des outils dans le but d’aider ces jeunes à s’exprimer…et ils y sont déjà parvenues tout seuls. Nous avons été surpris de constater à quel point ils avaient su prendre les rênes pour que tout soit organisé. Pour moi, c’est comme découvrir les passions qui animent ces personnes et leur donner les clés qui leur permettent de les développer.

Il est assez difficile de s’occuper de soi-même, mais nous avons tous des capacités à aider les autres à trouver leur voie dans la vie. Je me demande quel serait l’impact, si nous faisions prendre conscience aux jeunes le fait qu’ils doivent mettre en valeur leurs compétences et si nous leur rappelions aussi le rôle qu’ils pourraient jouer s’ils avaient la responsabilité de représenter un quartier ou celles de s’assurer d’avoir assez d’histoires à publier. Pensez-vous que ces jeunes aient conscience de tout cela ?

Je pense que cela ne s’applique pas seulement aux jeunes, mais à l’ensemble de la société. Pendant notre travail, nous rencontrons constamment des individus qui n’ont pas conscience de leurs capacités. Un changement doit être opéré dans le rôle de l’école et de la municipalité pour leur permettre de réussir.

Nous avons travaillé à Muirhouse, nous nous sommes occupés de toute la communauté pour les aider à prendre les choses en main – comme organiser un groupe de parole destiné aux mères ou créer un club de football. La plupart des gens se retournent vers la municipalité en se disant que c’est leur boulot. Il y a beaucoup de travail à accomplir. Lorsque vous leur demandez quels sont leurs domaines de compétence, même ceux qui sont allés à l’université ont du mal à répondre.

Ce qu’il manque, c’est l’inspiration. Celle qui permet de croire que tout est possible, lorsque l’on se retrouve face à la bureaucratie et que l’on veut faire les choses différemment. Nous voulons leur dire « qu’ils doivent organiser leur communauté comme une start-up, identifier les atouts qu’elle possède et trouver ceux qui souhaitent s’investir ». Lorsque vous parlez aux gens, ils vous disent qu’ils voudraient utiliser cet immeuble vide, mais qu’ils ne peuvent pas. C’est pour cela que nous devons essayer d’éliminer ces obstacles.