Le contrôle des flux migratoires par l’UE au-delà de ses frontières

Traduction de Camille Nore

« Toute personne est libre de quitter n’importe quel pays, y compris le sien »
Article 12.2 du Pacte  International relatif aux Droits Civils et Politiques.

L’Europe étend le contrôle aux frontières vers le sud.

Afin d’améliorer l’efficacité du combat contre l’immigration illégale en provenance des pays sub-sahariens, l’Europe a entrepris un programme agressif en la matière en coopération avec les Etats bordant la Méditerranée et par la suite avec les pays sahéliens. Le but étant de réduire les mouvements migratoires dans la région du Sahara, mais cela est trop souvent fait sans respecter les droits de l’Homme.
Depuis 2001, les représentants des pays méditerranéens (l’Algérie, la Lybie, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie au sud, l’Espagne, la France, l’Italie, Malte et le Portugal au nord) sont « parvenus à un accord » quant à la gestion des flux migratoires entre l’Afrique et l’Europe. Les résultats de ces accords sont clairement favorables à l’Europe qui étend son contrôle vers le sud.
Le durcissement de la politique de migration dans les Etats d’Afrique du Nord a été confirmé lors de la Conférence Ministérielle sur la Migration en Méditerranée Occidentale (Tunis, Octobre 2002). Alors que ces mesures ne concernaient initialement que les contrôles des côtes méditerranéennes et atlantiques, elles s’étendent maintenant à quelques Etats du Sahel.
L’Europe s’est dotée de ressources matérielles et financières lui permettant d’assurer le contrôle de ses frontières et au-delà, grâce à la création de plusieurs programmes tel que le SIVE (Système Intégré de Surveillance Extérieur) en 1998, système de surveillance électronique des côtes sud espagnoles, Frontex en 2004, pour la gestion des opérations aux frontières externes de l’Union Européenne ou le programme Sahamed géré par l’Italie depuis Mars 2010. De plus, plusieurs accords inter-Etats ont été conclus entre des Etats européens et nord africains. Ces mesures ne répondent pas aux questions concernant l’immigration, le contrôle aux frontières et surtout le respect des droits de l’Homme : elles déplacent simplement le problème ailleurs, hors de vue des citoyens européens.
Les migrants voyageant vers l’Europe font face à beaucoup de dangers pendant leur voyage et n’ont aucune protection. Ces voyages peuvent avoir des conséquences psychologiques et physiques. Les migrants sont souvent retenus en camp de détention pour un temps allant de quelques jours à plusieurs mois. Pendant cette période il y a eu des preuves de violation des droits de l’Homme de manière répétée. Les migrants, détenus dans des conditions inacceptables, n’ont pas accès à l’information, ne peuvent pas parler à un avocat et sont ensuite renvoyés sans pouvoir récupérer leurs biens ou leur argent. Ils subissent quelque fois des actes dégradants comme la torture ou le viol. Les réfugiés voient quelque fois leurs papiers déchirés par la police et les demandeurs d’asile ne voient jamais leurs droits respectés, au dépend du droit international. Ce mépris continu envers les droits de l’Homme a a été dénoncé par beaucoup d’organisations telles qu’Amnesty International ou Human Rights Watch.
De plus, ce phénomène migratoire est une source importante de revenu à la fois pour les compagnies aériennes (et autres acteurs privés) et pour les agents de l’Etat qui ont établi un système d’impôts en totale illégalité dépouillant les migrants de leurs modestes ressources financières (les officiers de police demandent de l’argent aux migrants dans de nombreux « check points »).

Alternatives Européennes préconise la création d’une collaboration meilleure, plus juste et mieux structurée entre l’Union Européenne et les pays tiers dans la zone des contrôles aux frontières et qui prendra efficacement en compte les droits des immigrants.

Plus d’informations :

Migreurop, Aux frontières de l'Europe, contrôles, enfermements, expulsions.
http://www.migreurop.org/IMG/pdf/Migreurop-2010-FR.pdf

Frontex: le film (avec le camp no border de Lesbos 2009)
http://www.youtube.com/watch?v=kOuFo5egBqE&feature=related


[1]Les pays sahéliens font habituellement référence: au Sénégal, à la Mauritanie, au Niger, au Burkina Faso, au Tchad, au Soudan, au Cap Vert, et quelque fois à Djibouti, à l’Ethiopie, à l’Erythrée, à la Somalie et au Kenya.