Nov 1, 2014
Trois questions a … Andy Williamson
Andy Williamson prendra la parole au Campus FixEurope à Berlin (du 21 au 24 Octobre). Il est reconnu à l’échelle internationale en tant qu’expert en démocratie numérique, en innovation et en variations de l’engagement. Facilitateur expérimenté, consultant, chercheur et commentateur se concentrant sur le numérique, la société et les politiques, Andy est passionné par l’idée de trouver des moyens innovants pour améliorer le fonctionnement de la démocratie pour tous. Il est entre autres le fondateur de Democratise, le Président de Do-it UK et est membre du conseil d’administration de Democratic Society.
Traduit par William Foster
Qu’entendez-vous par démocratie ‘intime’?
La démocratie traditionnelle hiérarchique, basée sur le pouvoir et la gouvernance est en train de mourir. Les anciens systèmes sont arrogants, dominants et ne conviennent plus. Ces systèmes ne répondent pas à nos besoins. Mais il n’est pas facile de changer cela à cause du pouvoir détenu par le système actuel. Tandis que la société demeure stratifiée, le pouvoir reste aux mains d’une minorité avec une conception de la démocratie basée sur l’idée de ‘faire à’ et non de ‘faire avec’. Il s’agit plus de paternalisme que de partenariat. Malgré le fait que l’abus de pouvoir compromette la légitimité démocratique, l’ironie du sort veut que le bouleversement que cela crée donne plus de pouvoir à ceux qui le possèdent déjà.
La distribution du pouvoir, mise à bon escient, est au cœur de l’opportunité dont nous devons profiter. Il s’agit de dislocation civique mais ceci est une dislocation des structures formelles du gouvernement et de la politique et non de l’action civique, des mouvements de protestations ou du volontariat de voisinage. Le concept de démocratie intime implique un changement de l’orientation de nos systèmes démocratiques vers un modèle qui reconnait la valeur des contributions des individus et qui se prête davantage à la collaboration et la co-créativité. Ce voyage est accéléré par le numérique et les nouveaux réseaux sociaux, car ils rapprochent les gens de la conversation, facilitent leur interaction, le partage et l’accumulation des connaissances.
A terme la démocratie intime équivaut à un changement culturel appuyé par de nouvelles conceptions des rapports de force. L’accélération, la perturbation et l’intégration des transformations durables sont dues au changement à l’échelle humaine de nos relations socio-culturelles et les changements de perspectives sur les rapports de force.
A votre avis, quels sont les obstacles empêchent les individus de devenir des citoyens actifs? Comment peuvent-ils être surmontés?
D’un point de vue technique, la plus grande barrière (lorsque l’on se le demande) semble être le ‘temps’. Cependant, nous ne pouvons pas prendre cette raison pour argent comptant. Nous pouvons toujours trouver le temps si nous sommes suffisamment motivés. De toute évidence, nous manquons de motivation pour participer à la démocratie traditionnelle.
Certains pays se vantent de leurs taux de participation électorale comme étant supérieurs à d’autres: ce n’est que du somnambulisme parmi la foule, suivant les dinosaures vers la comète. A travers toute l’Europe nous avons vu les électeurs se tourner vers les partis qui défient les traditions politiques de droite comme de gauche. Vous ne pouvez pas forcer les gens à adhérer à nos conditions, surtout s’ils sont méfiants à votre égard et se désintéressent du processus politique. Ceci n’est pas la faute des citoyens, c’est plutôt dû aux gouvernements technocrates de plus en plus distants, ainsi que l’émergence d’une élite politique quasi auto-générante. Les gens se sont éloignés de ces systèmes déconnectés de la réalité mais ne se sont pas éloignés des choses qui leur tiennent à cœur, ils agissent juste d’une façon qui n’est ni reconnue ni respectée par le système. Si la société a changé nous devons donc nous demander comment exploiter le potentiel de cette transition du pouvoir afin qu’elle grandisse, mûrisse et produise un nouveau type de démocratie, une démocratie active et basée sur la délibération, l’inclusion et la co-création. A un niveau très pratique il faut considérer les méthodes d’encouragement de l’engagement, lesquelles vont du fait de se montrer vraiment reconnaissants et répondre aux participations de la population qui donne de son temps et de son énergie, le fait de mettre au clair ce que les participants peuvent en tirer, et l’adoption de certains principes de la théorie ludique qui peuvent fournir des motivations, des récompenses et même de la compétition entre les participants. Nous devons construire des procédés collaboratifs qui ne se traduisent pas par un simple questionnaire ou réunion, il faut que nous concevions ce procédé de manière conjointe. Du début jusqu’à la fin, le gouvernement doit s’associer aux citoyens. Le processus est transparent et ouvert, les résultats sont clairs et les actions sont justifiées par le procédé.
Quel est le problème le plus urgent à régler en Europe ?
La démocratie moderne est complexe et compliquée. Divers endroits sont confrontés à des difficultés, des solutions et des problèmes divers. La construction culturelle démocratique se fait autour de nos lieux de vie et reflète nos préoccupations sociales, nos normes et nos attentes. Il est remarquable, du moins à travers l’Europe, que nous partagions les même préoccupations et défis. La confiance disparait petit à petit, les taux de participation électorale sont en chute libre, et comme nous avons vu aux élections du Parlement Européen de 2014, il y a une déconnexion croissante entre la politique traditionnelle et la démocratie fondée sur la résolution de problèmes. Si nous voulons résoudre cette situation par la construction d’une participation démocratique et la restauration de la confiance, nous devons rendre la démocratie attrayante aux yeux des individus qu’elle affecte, c’est-à-dire nous tous. Afin d’atteindre ce but nous avons besoin de nouvelles façons de travailler, de nouveaux talents et une volonté de lâcher prise du pouvoir. Nous devons accepter le fait que la démocratie n’est pas un produit à taille unique et que personne ne détient toutes les réponses. Afin que de nouvelles solutions collectives émergent, nous devons nous efforcer de faire le suivant:
- Reconsidérer notre relation avec l’espace et l’individu
- Contester la démocratie élitiste
- Comprendre que les procédés et les relations agissent sur les résultats de l’engagement; et
- Créer des espaces dédiés aux dirigeants courageux