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Soirée Fernando Pessoa

Traduit par Audrey Ubertino
Fernando Pessoa est l’une des figures intellectuelles européennes les plus importantes du siècle dernier.
Le Festival de l’Europe de Londres 2008 a consacré une journée entière à la découverte de ce mystérieux poète portugais.
Fernando Pessoa est une multitude. Né à Lisbonne en 1888, la réputation de ce mystérieux poète portugais a grandi de manière régulière au fil des ans, jusqu’à ce qu’il soit aujourd’hui considéré comme l’une des voix européennes les plus fondamentales du siècle dernier. La caractéristique la plus frappante de Pessoa est son utilisation constante des hétéronymes, ou égos littéraires, de telle manière qu’une pluralité de voix et de biographies sont la seule voix et la seule biographie possibles pour ce poète de la polygamie. Alberto Caeiro, Ricardo Reis et Alvaro de Campos sont les trois hétéronymes poétiques employés par Pessoa les plus développés mais, après sa mort, une véritable multitude de personnages, chacun étant l’auteur d’une collection de textes particulière, ont émergé d’une boîte contenant ses écrits (fragmentés, sur des vieux reçus de restaurant, des serviettes, des feuilles volantes).
Bernando Soares, l’auteur semi-hétéronyme du formidable Livre de l’intranquilité ; Antonio Mora, philosophe et sociologue ; le Baron de Teive, essayiste ; Thomas Coarse et Alexander Search, qui ont écrit en anglais ; Raphael Baldaya, astrologue… et la liste se poursuit avec soixante-douze noms et autant de genres littéraires. Tous les hétéronymes ont collaboré à des projets de publication, se sont critiqués et se sont même traduits les uns les autres. Le sensationnalisme, l’un des nombreux « mouvements » initiés par Pessoa, a été critiqué par Antonio de Seabra et compilé en anglais par Sher Henay, les deux étant le fruit de l’imagination de Pessoa. Le néo-paganisme a été ardemment défendu par Antonio Mora, le personnage philosophique de Pessoa. Alvaro de Campos et Ricardo Reis ont fréquemment attaqué la poésie de l’autre, mais se sont associés dans l’appréciation des vers d’Alberto Caeiro.
Les hétéronymes de Pessoa ont eu une véritable présence dans sa vie, bien au-delà du jeu littéraire ; l’unique relation amoureuse de Pessao, principalement épistolaire, a été brisée par l’interférence constante d’Alvaro de Campos, qui exaspérait sa bien-aimée, Ophelia Queiroz qui était, elle, bien réelle. Plus important encore, les hétéronymes qu’il endosse ne sont pas de simples alter-ego littéraires, comme Valéry et son Monsieur Teste ou Rilke et Malte Laurids ; ils sont entièrement autonomes, ce sont des éléments parfaitement existants, avec leur propre biographie, leur attitude, leur esthétisme, leur style et, de surcroît, ils expriment tous, dans le sens le plus profond du terme, une possibilité particulière d’être une « métaphysique », une véritable réaction, concrète et honnête, au mystère de l’être. Dans une lettre à Armando Cortes-Rodrigues, Pessoa écrit : « Je considère dénuées de sincérité toutes les choses… qui ne contiennent une idée métaphysique fondamentale, dans laquelle il n’y ait, même en coup de vent, une notion minimum de gravité et de mystère de la Vie. C’est pourquoi, tout ce que j’ai écrit sous les noms de Caeiro, Reis et Alvaro de Campos est authentique. Dans chacun d’eux, j’ai mis un concept profond de vie, différent chez chacun des trois, mais tous profondément conscients de l’importance mystérieuse de l’existence. »
La production de Pessoa reflète l’évolution d’une vie qui a abandonné toutes prétentions et qui souhaite trouver un port. A première vue, on pourrait avoir l’impression qu’elle quitte le plateau de l’incrédulité qui caractérisait la plupart des créations modernistes, et qu’elle trouve son écho le plus clair dans le Livre de l’intranquilité de Pessoa-Bernando Soares, l’autobiographie sans fondements d’un employé solitaire dans laquelle tous les thèmes chers à la littérature de la haute-bourgeoisie du début du vingtième siècle trouvent leur place, empêtrés dans un absurde sentiment de normalité qui préfigure déjà certains des personnages de Becket à venir. Mais ce serait réducteur, et en fait impossible, d’inscrire Pessoa dans la simple réaction existentielle à un monde dénué de sens  et sans certitude.
 Si Pessoa quitte le « néant » du monde, c’est uniquement pour transformer ce néant en une possibilité éternelle, pour mener une révolution constante de la pensée en « usurpant le pouvoir divin d’être tout. » Et c’est l’effet atteint par les hétéronymes tridimensionnels, un effet de multiplicité de ce qui est véridique, une cristallisation de l’expérience avec sa réfraction  d’un millier de nuances d’existences possibles ; « toutes les façons de simuler », écrit le poète, « le fait que je comprends le monde ou, mieux, simuler le fait qu’il peut être compris. »
Autopsychographie. Le poète sait l’art de feindre. Il feint si complètement Qu’il en vient à feindre qu’est douleur La douleur qu’en fait il sent. Et ceux qui lisent ses écrits Dans la douleur lue sentent bien Non les deux qu’il a connues, Mais celle qu’ils n’éprouvent point. Et ainsi, en ses engrenages Tourne, jouet de la raison, Ce petit train mécanique Qui de cœur a reçu le nom. 1er avril 1931. Traduction française par Armand Guibert. La traduction anglaise a été réalisée par Richard Zenith et apparait dans son livre Fernando Pessoa : A little Larger than the Entire Universe. Selected Poems (Penguin Classics) Fernando Pessoa: moderniste ou post-moderniste européen?
Célèbre écrivain et traducteur, Richard Zenith présentera une conférence et fera la lecture d’une sélection de vers de Pesssoa.


Accompagné d’une composition spéciale pour violoncelle de Vicky Steiri et de la projection d’une vidéo d’art portugaise contemporaine. GRATUIT vendredi 7 mars, 18h30, St Peter’s Church (Mayfair), Vere Street, Londres W1G 0DQ dans le cadre du Festival de l’Europe de Londres, voir ici pour le programme complet.